Val de Durance
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La création dans l’univers concentrationnaire

vendredi 5 juin 2009, par Rixte Lisa

 Dans un univers où la déshumanisation et la terreur sont omniprésentes. Les déportés pour un instant d’échappement ou d’obligation parfois, n’hésitaient pas à faire de la création artistique et littéraire en risquant même leur vie, en se livrant à un exercice "interdit"...

Les objets fabriqués

La fabrication d’objets sculptés, brodés révèle un certain talent artistique de la part de leurs auteurs. L’ensemble de ces fabrications constituent en soi un acte de résistance : les matériaux sont en général volés à l’atelier, le port d’une marque ou la possession d’un objet personnel peut engendrer les exactions.
L’objet fabriqué est souvent et d’abord utilitaire : cuillère, couteau… Qui permettent aux déportés de conserver un peu de dignité, de pouvoir manger sans laper.
C’est aussi ces après midi en commun où on fabrique un décors pour noël, des jeux de cartes, des cadeaux pour l’anniversaire de l’un, de nombreux accessoires qui permettent de resserrer les liens de cette communauté.
Cette solidarité s’exerce aussi vers les plus démunis avec la fabrication de jouets par les enfants.

Les dessins

30 000 dessins et croquis ont été réalisés dans les camps de concentration nazis. Ils ont pu être réalisés par des artistes professionnels ou par des amateurs. Dans le temps de la déportation, lorsque l’identité de l’homme se réduit à des fonctions élémentaires, à l’appel, au travail, à la nourriture, au sommeil, aux coups - dessiner est interdit et pour dessiner il faut voler. Dans les années de détention le dessin représente surtout la vie quotidienne, des scènes banales de l’enfermement. Ce n’est généralement pas la violence qui est mise en avant, mais les corvées, ou même parfois des menus, des chansons, des anniversaires ou encore des portraits... Il semble que tous ces dessins de l’attente soient des appels à la vie. Ils ne démontrent pas. Ils suppriment la violence pour l’évacuer... Dans les moments de libération, le dessin portera surtout sur l’horreur sur l’extermination.

 
Ce qui s’est écrit dans les camps, s’est écrit clandestinement. Il ne pouvait en être autrement car la prison (ou Bunker) signifiant des conditions aggravées de détention ou parfois pire…, était au bout en cas de découverte ou de dénonciation. Les situations ont pu différer d’un camp à l’autre, d’un Kommando à l’autre, d’une période à l’autre dans un même camp, mais pour l’immense majorité des détenus, écrire demeurait un exploit physique, matériel, moral et intellectuel.

Les écrits :

Ce sont pour l’essentiel des lettres et journaux clandestins rapportés par leur auteur ou un camarade survivant, parfois découverts enfouis ou cachés dans les camps, après la libération. Rédigés hâtivement, parfois inachevés et interrompus, ils n’ont d’autre but que de fixer sur le papier l’horreur qui se déroulait sous les yeux des témoins, de créer un lien avec le monde extérieur au moyen de quelques mots griffonnés le plus souvent sur des débris de papier d‘origine très diverses. Certaines de ces précieuses notes ont pu être publiées après la guerre et aussi complétées par leur auteur à leur retour des camps, s’ils ont connut la chance d’en survivre. Cette poésie dépasse la valeur de simple témoignage, quelque révélateur et accusateur qu’il soit. Elle est le geste de résistance humaine à l’oppression démesurée et criminellement mutilatrice, fondée dans les camps, sur des prétextes politiques ou raciaux.

Les poèmes :

L’essentiel de la production littéraire de la période de la déportation est constitué de milliers de poèmes écrits dans les prisons, les ghettos et les camps nazis, très souvent par des détenus maniant cette forme d’expression pour la première fois, mais faisant preuve d’une authentique ferveur poétique, qui sut parfois atteindre le sublime. Ces poèmes sont l’irrésistible expression, la preuve d’une vie spirituelle et d’une survie de la pensée créatrice au cœur d’un système acharné à la destruction et à la négation de l’homme.
Différents thèmes étaient abordés : poème de l’horreur, mais aussi poèmes de l’amour, de la camaraderie, de la solidarité, de la patrie, de l’espérance, etc.. Il expriment la faim de beauté qui gagne chacun en opposition aux laideurs et aux atrocités des camps.

Exemple de POEMES :

SURSAUT

Laissez, amis, tous ces chants de tristesse !
Sans eux, déjà, qu’il est lourd notre cœur !
Que ne veux-tu ressusciter, jeunesse,
Malgré le poids de toutes
Toujours la vie a-t-elle été mauvaise ?
Rappelez-vous la joyeuse saison !
Allons, enfants, chantons la Marseillaise
Pour ébranler les murs de la prison ! »
Grigori Liouchine.

Il faudra que je me souvienne
 
Il faudra que je me souvienne,
Plus tard, de ces temps horribles,
Froidement, gravement, sans haine,
Mais avec franchise pourtant.
 
De ce triste et laid paysage,
Du vol incessant des corbeaux,
Des longs blocks sur ce marécage
Froids et noirs comme des tombeaux.
 
De ces femmes emmitouflées
De vieux papiers et de chiffons,
De ces pauvres jambes gelées
Qui dansent dans l’appel trop long.
 
Des batailles à coups de louche,
A coups de seau, à coups de poings.
De la crispation des bouches
Quand la soupe n’arrive point.
 
De ces « coupables » que l’on plonge
Dans l’eau vaseuse des baquets,
De ces membres jaunis que rongent
De larges ulcères plaqués.
 
De cette toux à perdre haleine,
De ce regard désespéré
Tourné vers la terre lointaine.
O mon Dieu, faites nous rentrer !
 
Il faudra que je me souvienne…

 

 
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